Les Décâblés – Bruit Blanc Musiques Actuelles est une association briançonnaise qui organise chaque hiver l’Altitude Jazz Festival. Depuis près de 20 ans, l’événement propose au cœur des Hautes-Alpes une programmation qui va du du jazz traditionnel aux styles plus contemporains, rassemblant habitants de la région comme voyageurs de passage autour d’un festival fortement ancré dans son paysage local.
Depuis 2022, le festival intègre à sa programmation des concerts en plein-air sur une scène très particulière : le Pavillon Bruit Blanc, structure à la fois couverte, durable et collective, alimentée en énergie par des vélos générateurs d’électricité.
Pour en savoir plus sur ce projet, le COFEES a rencontré Noémi Duez, coordinatrice générale du projet Bruit Blanc – Altitude Jazz Festival.

Pourriez-vous décrire le fonctionnement de cette scène ?
Le Pavillon Bruit Blanc, c’est une scène mobile couverte (légère, déplaçable et démontable pour s’affranchir de toutes contraintes), durable (avec un véléctrogène pour alimenter les concerts), collective (puisque c’est le public qui pédale !) et unique (sa structure a été conçue par Bruit Blanc et réalisée par des artisans locaux).
Avec ce pavillon, il est possible d’aller partout. En plus d’être esthétique, sa structure légère, conçue sur mesure, démontable, modulable et transportable peut être installée au bord d’un lac comme dans la cour d’une école. Elle offre une liberté totale pour s’affranchir des contraintes et amener de la musique partout.

C’est aussi une scène verte : la musique, c’est bien, mais la musique éco-responsable, c’est mieux. Si agir pour notre planète n’est plus une option, abandonner la musique n’en est pas une non plus. La solution : un véléctrogène ! Le système de son et lumière qui anime le pavillon est optimisé pour pouvoir être alimenté en électricité par une flotte de vélos de seconde main, remis en état pour l’occasion, sur lesquels le public pédale. Ce parc de véléctrogènes a été conçu en collaboration avec deux associations locales, Mobil’idées (Gap) et l’Atelier Cyclonique (Briançon). Chaque spectateur qui pédale peut voir en temps réel l’énergie qu’il produit et assister au concert. C’est une scène collective, qui permet de créer du lien – et dans nos contrées montagneuses, pédaler est un bon moyen pour se réchauffer !
Nous proposons sur cette scène des concerts intimistes (200 personnes), plutôt dans le soutien à la découverte et à l’émergence artistique. Les phases de montage, démontage et de transport nécessitent d’embarquer des bénévoles toujours plus passionnés dans cette belle aventure.
Comment vous est venue l’idée de ce projet ? Qui en était à l’initiative ?
Lors de l’Altitude Jazz Festival 2022, avec les contraintes de la crise sanitaire, l’association a organisé des concerts en extérieur en plein hiver, au coin du feu, qui ont rencontré un vif succès. Tout en extérieur, sous les étoiles, sonorisés et illuminés comme de vrais concerts dans des lieux naturels improbables et alimentés en partie par l’énergie de spectateurs juchés sur une série de vélos… Des instants magiques, couplés d’une réussite d’énergie verte et collective.
Face à l’engouement généré par ce format plus intimiste, Bruit Blanc a décidé de poursuivre cette expérience éphémère en un mouvement permanent, plus beau, plus grand, plus pratique et encore plus durable. Et ainsi est né le Pavillon Bruit Blanc.
Quels étaient les objectifs poursuivis avec sa mise en place ?
Les objectifs étaient de réaliser une structure autonome, légère, esthétique, facilement montable et démontable, pouvant s’installer partout et autonome en énergie grâce à la participation du public (qui pédale sur les vélectrogènes), pour déployer de la musique au plus près des gens et dans des espaces naturels sans laisser de traces de passage dans le paysage.
Comment le projet a-t-il été reçu par les artistes et le public du festival ?
Les concerts “full moon” initiés en 2022 ont eu un tel succès et reçu tant d’engouement du public comme des artistes que cela a fait émerger l’idée du Pavillon. Par la suite, le projet Pavillon a été très bien reçu et soutenu tant par le public (financement participatif) que par les institutions et les partenaires qui nous sollicitent pour l’utiliser.
Le système d’alimentation en énergie par l’action des spectateurs qui pédalent sur les vélectrogènes est généralement une grande surprise pour le public et les organisateurs.
Quels sont vos partenaires opérationnels ?
L’association s’est entourée d’artisans locaux (soudure, couture, toile, pièces bois et métalliques…) pour la fabrication de la structure et de l’association Mobil’idées pour le système de véléctrogènes. Des professionnels du matériel technique de spectacle vivant sont intervenus dans la conception du système de diffusion. Enfin, cette conception a nécessité un engagement fort d’une équipe de bénévoles tant sur la conception du prototype que sur les constructions et les tests.
Comment avez-vous financé ce projet ?
Le projet représente un investissement de 40 000€ financé de la manière suivante : 27% de fonds propres (financement participatif (crowdfunding), mécénat et fonds associatifs) et 73% de subventions publiques d’investissement (FNADT, DRAC, FDVA, Département des Hautes-Alpes et Région Sud).
Avez-vous rencontré des difficultés ou des freins dans la réalisation du Pavillon Bruit Blanc ?
S’agissant d’une structure unique en son genre, un prototype, il a fallu s’associer à un bureau de contrôle pour valider la sécurité et les conditions d’exploitations du Pavillon et être en capacité de l’assurer.
Ce dispositif nécessite désormais d’être connu pour trouver son modèle économique et permettre un fonctionnement régulier. Comme toute structure extérieure éphémère, il y a un coût d’exploitation incompressible (salaire, montage, démontage et transport).
Disposer d’un tel outil nécessite également d’anticiper les problématiques de stockage.

Quels développements ou améliorations sont encore à venir ?
Actuellement les vélos utilisés pour alimenter le Pavillon en énergie sont loués à l’association Mobil’idées. L’objectif à moyen terme est de constituer un parc de vélos attachés au Pavillon en équipant des vélos de seconde main. Ce chantier nécessite l’implication d’une équipe bénévole avec des compétences sur ce type d’installation.
L’autre axe de développement du Pavillon est de le faire connaître auprès des organisateurs d’évènements afin de favoriser sa circulation au-delà de la seule activité de l’association et des premiers partenaires locaux. Cela permettrait de proposer une solution autonome en énergie pour accueillir des concerts. Pour ce faire, nous allons réaliser des images et des plans de qualité professionnelle grâce à une aide du CNM dans le cadre du contrat de filière.
Quels conseils donneriez-vous à d’autres festivals ou structures qui souhaiteraient développer le même type d’initiative ?
Bien anticiper la partie réglementaire et sécurité lors de la conception et la construction de la structure afin d’obtenir une immatriculation et un respect des règles liées au CTS (chapiteau, tente et structure).
Quels autres projets liés à la RSE/RSO sont en cours ou à venir ?
La mise en exploitation de ce Pavillon et la promotion d’événements autonomes en énergie grâce à ce dispositif.
L’association souhaite développer la circulation du Pavillon, pour les festivals mais aussi des initiatives locales avec des prestations du Pavillon seul ou sur des formules clefs en mains avec des propositions artistiques. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de Bruit Blanc. ou contactez Noémi Duez à l’adresse noemi(a)bruitblanc.net !